Je commence mon carnet de voyage en vous parlant de notre randonnée au Piton de la Fournaise. Il faut dire que le volcan a tenu une place importante dans nos préparatifs de voyage et de notre programme. Même si le volcan s’est réveillé plusieurs fois cette année (janvier, mai et juillet), nous ne sommes pas arrivés à temps pour le voir en action. Malheureusement pour nous, sa dernière activité s’est achevée quelques jours avant notre arrivée. Dommage, mais voir couler de la lave en vrai n’était pas pour cette fois.
Et pourtant, visiter La Réunion sans inscrire le Piton de la Fournaise dans notre voyage était inconcevable. Il fait parti des volcans les plus actifs au monde. Pouvoir s’en approcher ou marcher dessus est déjà une expérience exceptionnelle en soi. Le découvrir sous la nuit puis quelques heures plus tard avec la lumière du jour apportent une dimension incomparable à mon sens. Maintenant que j’ai fait cette randonnée en partant de nuit, j’en suis persuadée et je vous le recommande vivement. Chaque lueur, chaque obscurité, chaque nuage, chaque ciel étoilé vous révélera un nouveau visage du volcan. C’est comme si vous voyez défiler des tableaux impressionnistes en grandeur nature. Faire cette randonnée de nuit permet définitivement de découvrir plusieurs de ces facettes en très peu de temps. Malgré les quelques difficultés que cette condition rajoutent à cette randonnée, cela vaut clairement le détour.
La randonnée Pas de Bellecombe vers le cratère Dolomieu
Cette randonnée phare de La Réunion fait partie des randonnées dites difficiles. Il s’agit d’un aller-retour 12 kilomètres avec un dénivelé d’environ de 516 mètres de dénivelé.
Avec les copains (ceux avec qui nous avons passé notre deuxième partie du voyage), il a été décidé de faire cette randonnée de façon à assister au lever de soleil du haut du cratère du volcan, le cratère Dolomieu. Pour cela, nous avons dû rejoindre le gîte du volcan dès la veille 18h. Ce gite se trouve à 750 mètres du Pas de Bellecombe, l’accès à l’enclos pour débuter la randonnée.
Vers le Piton de la Fournaise : la route du volcan
Nous avons donc parcouru la route forestière du volcan qui est une route sinueuse mais tellement magnifique. Il y a eu beaucoup de passages de brouillards brusques. C’était bizarre de traverser ces couches épaisses de nuages et de retrouver régulièrement des passages très ensoleillés. Mais la météo est imprévisible dans les hauts reliefs alors il ne fallait pas trop tarder. La lumière du jour allait disparaître et il fallait rejoindre rapidement le gîte.
Au détour d’un virage, le panorama est chamboulé. Votre souffle s’accélère, votre cœur palpite, vos yeux s’écarquillent et vous avez envie de vous pincer pour voir si vous ne rêvez pas. Un immense paysage martien s’offre à vous ! C’est la Plaine des sables, avec ses nuances de rouge, d’ocre et de brun, sans aucune faune et flore, on se croirait sur une autre planète. Au milieu de cet espace grandiose, une route s’étend de tout son long. Elle conduit au gîte mais va également jusqu’au parking du Pas de Bellecombe, l’enclos du Piton de la Fournaise.
La magie du départ de nuit
Réveil à 2h15, la nuit fut courte ou plutôt devrais-je dire qu’il n’y avait pas eu de nuit du tout. En tout cas, c’est comme si j’avais eu à peine le temps de m’assoupir dans mon lit superposé qu’il fallait déjà se préparer. On s’active avec les copains et on se retrouve sur le parking du gîte pour récupérer les dernières affaires dans les voitures.
Nous voilà sous un ciel étoilé que je n’oublierai jamais. Les étoiles brillaient par milliers et la voie lactée était présente comme pour marquer cette aventure qui débutait. La forte obscurité de la nuit faisait scintiller les étoiles encore plus fort. Chris avait profité de ce ciel dégagé pour aller le capturer en images avant d’aller se coucher. Les images parlent d’elles-mêmes, elles sont de toute beauté. Je salue le courage de Chris d’avoir bravé le froid dans la nuit noire juste avant de se coucher pour une poignée d’heures. J’espère que vous saisirez la splendeur de ce ciel auquel nous avons eu droit cette nuit-là.
Du Pas de Bellecombe au cratère Dolomieu
Départ donc à trois heures du matin, équipés de nos lampes frontales, gants, bonnets et sacs à dos, nous commençons notre randonnée. Après avoir rejoint le Pas de Bellecombe, il faut descendre l’escalier pour rentrer dans l’enclos. De là il suffit de suivre les marques blanches pour la randonnée. A ce moment-là, l’œil distingue que très peu de choses. La concentration se porte alors uniquement sur ces points. Heureusement la traversée de l’enclos se fait sans difficulté. En effet, cette partie de la randonnée est assez plate.
Bientôt l’ascension débute. A la lueur de nos lampes, on perçoit de temps à autre la silhouette du volcan mais cela s’arrête là. Il fait sombre. Les étoiles nous accompagnent dans notre marche. Nos yeux sont presque constamment baissés. Sous nos pas, on ressent la dureté du terrain. La lave défile sous nos pieds mais elle prend constamment diverses formes. Il y a celle qui lisse et ou plissée, la lave pahoehoe ou appelée aussi cordée. On la retrouve beaucoup dans la partie basse du volcan. Marcher dessus est beaucoup plus simple que sur la deuxième catégorie de lave. Il s’agit de la lave graton. C’est une lave poreuse mais dure qui s’est figée en dentelles. Il en existe de plusieurs couleurs mais dans la nuit impossible de s’en rendre compte. La seule préoccupation à ce moment-là est d’adapter notre marche à cette lave pour continuer notre parcours.
Quand l’inattendu se produit : ma chute
Au cours de la randonnée, les distances entre les personnes de notre groupe se sont créées. J’ai commencé cette randonnée fatiguée, peut-être même épuisée après trois semaines de voyage intense. Chris m’avait même fait remarqué que mon rythme de marche était bien en-dessous de mon rythme habituel et qu’il fallait que je gère cela pour la suite de la randonnée. Malheureusement, la fatigue a eu raison de moi et quelques secondes d’inattention m’ont valu une belle chute sur de la lave graton un peu plus haut. J’avais eu à peine le temps de voir les copains filer à l’horizon quand je me suis prise les pieds dans la roche. En plus de m’être pris de la lave graton dans les genoux, j’ai atterri avec les mains sur le sol malheureusement non plat… La douleur fut vive, j’avais l’impression que la roche s’était incrustée en moi…
Je suis restée couchée de longues minutes à me tordre de douleur. Heureusement que Chris a rebroussé chemin pour venir m’aider et me soutenir. Après vérification, je n’avais rien de cassé mais la douleur était tellement aiguë que nous ne savions pas si j’allais pouvoir me relever. Une pause s’imposait pour que je retrouve mon sang-froid et un semblant de force (après une compote et une barre de céréales). Nous avons soufflé et surtout réfléchi : nous étions à deux tiers de la randonnée, nous avions perdu beaucoup de temps et nous allions sûrement louper le lever du soleil en haut du Piton de la Fournaise. Mais il était impossible pour moi de céder à cet évènement et de ne pas voir ce cratère. J’ai convaincu Chris que je continuerai.
Le mental pour aller plus loin
J’ai fini bien sûr par me relever car je voulais à tout prix finir cette randonnée. J’ai pris appui sur l’épaule de Chris et utilisé mon bâton de marche. Nous avons donc continué notre chemin collés l’un à l’autre. A deux, ensemble, nous étions plus forts. Aux bras de mon homme, rien ne pouvait m’arrêter. La persévérance et le soutien psychologique et moral de Chris m’ont clairement aidé à me dépasser. Nous irions jusqu’au bout, c’était décidé.
Plus loin le soleil devait se lever dans quelques minutes. Nous nous étions frayés jusque-là un chemin un peu plus adapté à ma condition physique pour avancer. Les nuages commencèrent à entourer le volcan alors que nous étions sur la dernière ligne droite. Nous avons compris à ce moment-là qu’il n’y aura pas de vrai lever de soleil. La vue s’était couverte. A cet instant, j’ai préféré me dire pour me donner du courage que le soleil m’attendait caché derrière les nuages. Je ne devais rien lâcher et avancer. En effet, lorsque nous arrivâmes au cratère, le ciel s’est doucement dégagé et le soleil baigna mon visage. Le volcan du Piton de la Fournaise, nous l’avions fait.
Sur le chemin du retour…
Après avoir admiré le majestueux cratère, aperçu la côte et la mer. Il a bien fallu reprendre le chemin inverse. Cette fois, notre ami Stéphane est redescendu avec nous pour nous aider. En plus de nous soulager du poids des sacs, j’ai eu droit à une deuxième béquille humaine. Trêve de plaisanterie, son aide m’a beaucoup touché. La descente a été plus douloureuse pour mes jambes. Impossible de les plier et de les utiliser comme appui. On y est allé en douceur. Nous avons profité de notre rythme lent pour admirer les différents paysages du Piton de la Fournaise qui s’offraient à nos yeux et observer les différentes couleurs et formations que la lave prenait. Nous avons donc focalisé sur le côté positif ;).
Informations pratiques
- Gîte du volcan : Il n’y en a qu’un. Il faut s’y rendre avant 18h et la route forestière du volcan vous y conduira. Toutes les informations ici.
- Informations sur la montée du Piton de la Fournaise depuis le Pas de Bellecombe sur ce site. Vous y retrouverez toutes les belles randonnées de La Réunion
- Vous êtes férus de volcan ou vous préparez un séjour à La Réunion, tenez-vous informés sur le Piton de la Fournaise sur ce site d’actualités.
Bilan
Cette randonnée aura été une forte expérience pour moi. Malgré les difficultés, j’ai tout de même réussi à apprécier ce que cette aventure avait à offrir. Vous voyez que même si j’en ai bien bavé avec ces entorses aux genoux, la découverte du Piton de la Fournaise est resté un coup de cœur. Le volcan restera certes gravé en moi d’une manière très spéciale. Je referais cette randonnée sans hésiter 😉
Cette aventure m’aura démontré que nous pouvons aller au-delà des limites, que le mental est une composante déterminante dans les activités physiques. C’est le genre d’expériences qui en apprend beaucoup sur soi et quelque part ça fait du bien de se redécouvrir. Je suis fière d’avoir été jusqu’au bout et d’être allée au-delà de mes douleurs. Avez-vous vécu des épisodes qui ont révélé une nouvelle facette de vous ? Les voyages vous apprennent-ils à vous mieux connaître ? Si vous aussi, vous avez vécu ce genre d’expériences, n’hésitez pas à les partager en commentaires. Si vous connaissez le Piton de la Fournaise, comment avez-vous vécu cette randonnée ?
On se retrouve très vite pour d’autres articles sur La Réunion.
Héma
★ Photos : Chris’n’Hem’s ★
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